#ChallengeAZ │ J… La méthode Jacotot

A l’heure où l’on parle de l’Ecole de la confiance et où des méthodes atypiques (Montessori, Steiner, Waldorf) ont de plus en plus de succès, en voici une qui a fait parler d’elle en son temps : la méthode Jacotot. Point commun de toutes ces méthodes : la motivation de l’enfant, moteur de l’apprentissage.

Gravure de Joseph JACOTOT

Jean Joseph JACOTOT (1770 Dijon – 1840 Paris) est un pédagogue français, créateur de la méthode d’enseignement, dite « méthode Jacotot ». Il se propose  d’« émanciper les intelligences ». Il prétend en effet que tout homme, tout enfant, est en état de s’instruire seul et sans maître, qu’il suffit pour cela d’apprendre à fond une chose et d’y rapporter tout le reste ; que le rôle du maître doit se borner à diriger ou à soutenir l’attention de l’élève.

Il proclame que :
==> toutes les intelligences sont égales ;
==> qui veut peut ;
==> on peut enseigner ce qu’on ignore.

En 1818, exilé à l’université de Louvain (Belgique), il applique sa méthode avec succès, auprès d’étudiants flamands qui apprennent le français sans prendre aucune leçon.

Cette méthode est appliquée par Gatien CHOISNARD (1791 Cinq Mars la Pile – 1853 Châtellerault), principal du collège de Civray (de 1820 à 1832).

Le samedi 11 juillet 1829, une commission venue à Civray pour vérifier l’efficacité de la méthode expose que : « 25 élèves du premier âge entrés à l’école au mois de novembre, ont su lire au mois de mars ; plusieurs ont appris en deux mois et même en un mois. Les élèves examinés lisent très bien comme on le ferait par l’ancienne méthode au bout d’un an ou dix-huit mois. 7 enfants entre 8 et 14 ans sachant lire et écrire par la méthode Jacotot, ont récité par cœur quatre livres de Télémaque, ont fait l’analyse grammaticale des phrases et déduit eux-mêmes les règles qu’ils n’apprennent point dans les grammaires ».

En août 1831, le sous-préfet de Civray souhaite développer cette méthode auprès d’un plus large public. Il explique au Préfet que « M. Gatien CHOISNARD a élevé une école payante d’après la méthode Jacotot ; les résultats que ce maître obtient sont très satisfaisants, je m’en suis assuré par moi-même. Après un long entretien avec ce professeur sur les besoins qu’éprouvait la ville d’élever une école gratuite, il a fini par me dire qu’il s’en chargerait volontiers. »

En mai 1832, le sous-préfet confirme le succès de cette méthode. « MM les inspecteurs d’académie ont visité l’école salariée de M. CHOISNARD, ils ont été enchantés des résultats qu’il obtient et les éloges qu’ils lui ont donnés publiquement, l’ont déterminé à se mettre en position d’en mériter d’autres ».

Le 10 février 1834, le conseil municipal de Civray « décide, en fondant l’école communale, que 60 élèves y seraient reçus gratuitement ».

On ne sait pas quand ni pourquoi cette méthode a pris fin.

Sources : AD 86 – 2 O 92/16 ; Wikipédia

Pour en savoir plus :
Exposé sommaire de la méthode de M. Jacotot par Pierre Jacotot – 1829
Rapport sur la méthode d’enseignement mutuel de M. Jacotot par M. Legentil-Laurence – 1829
Le maître ignorant : cinq leçons sur l’émancipation intellectuelle par Jacques Rancière – 2009

#ChallengeAZ │ C… De Chaunay au Paraguay

De Chaunay (Vienne 86) au Paraguay ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Petite chronique d’une recherche

L’année dernière, je relevais les mariages de Chaunay du fin 19e siècle. Plusieurs mariages PARADOT ont eu lieu et le père d’un des époux, Alexis PARADOT était mentionné « décédé à la Colonie Nationale Presidente Gonzalez » au Paraguay en décembre 1892.

Mariage d'Emile PARADOT et Florina PETIT à Chaunay, Vienne 86, généalogie

Acte de mariage à Chaunay le 15 février 1898 d’ Emile PARADOT avec Florina Françoise PETIT © Archives départementales de la Vienne ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Mon arrière grand-mère étant une PARADOT et originaire du sud Vienne, cette information m’a interpellée. Y avait-il un lien entre ces deux familles ? J’ai « lancé » un message sur le forum du CGP. Sans résultat. J’ai cherché la « Colonie Nationale » sur des sites relatifs à l’émigration en Amérique du sud. Sans succès…. Quelques mois plus tard, je découvre par hasard qu’un adhérent du CGP s’appelle M. BOLCATTO-PARADOT, qu’il est franco-argentin et qu’il « descend » d’Alexis PARADOT (mort au Paraguay). Nous nous découvrons cousins … à la 10e génération. 

Reconstituer le parcours des PARADOT partis au Paraguay n’est pas une mince affaire. Grâce notamment aux souvenirs familiaux de M. BOLCATTO, aux registres d’état-civil, aux recensements et aux registres des insoumis (hommes ne s’étant pas présentés à la conscription militaire), on peut retracer l’histoire de 2 familles migrantes en Amérique du Sud.

Le contexte à Chaunay

Plan de situation à Chaunay ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Alexis PARADOT est né le 02/06/1841 à Brux (86), marié à Madeleine (ou Marie Madeleine) PETIT en 1865 ; il est charpentier. De 1866 à 1886, ils habitent « le Fouilloux », un petit hameau au nord de Chaunay. En 1886, ils ont 7 enfants : Alexis, 17 ans, Aristide, 16 ans, Jules, 14 ans, Emile, 13 ans, Jeanne, 12 ans, Suzanne 9 ans, François, 7 ans, tous nés à Chaunay.

Louis POUILLOUX est né le 05/12/1848 à Chaunay (86), marié à Christine PINGAULT en 1870. En 1881, il est tisserand, elle est lingère. Jusqu’en 1886, ils demeurent à « Vant », petit hameau au sud de Chaunay. En janvier 1888, ils ont 6 enfants : Mathilde, 19 ans, Angèle, 17 ans, Achille, 14 ans, Geneviève Adrienne, 13 ans, Louis Oscar, 6 ans, Eveline, 2 mois, tous nés à Chaunay.

Le contexte au Paraguay

Entre 1864 et 1870 une guerre oppose le Paraguay à la Triple Alliance du Brésil, de l’Argentine et de l’Uruguay. Après 5 ans de guerre, le Paraguay est anéanti ; il a perdu 40 % de son territoire initial et les deux tiers de sa population totale, dont 80 % des hommes. 

En 1890, la « Revue du Paraguay » indique que le pays compte alors 300 000 habitants ; la capitale, Asunciòn, environ 22 000 habitants. « Le français se parle beaucoup à Asunciòn et à la Villa Hayes où l’on trouve 228 Français, 112 Suisses et 14 Belges. En 1888, on note une augmentation sensible de population liée à un courant d’émigration vers ce pays. 4 à 5 vapeurs partent régulièrement toutes les semaines de Buenos-Aires pour Asunciòn. La fertilité du sol est admirable, les bois et essences y sont à profusion. L’exportation de bois durs et de construction acquiert tous les jours une plus grande importance ».

Qui est parti ?

Les PARADOT/PETIT et POUILLOUX/PINGAULT sont partis avec un certain nombre de leurs enfants. Les deux familles se connaissent-elles avant de partir ? Peut-être.

Alexis PARADOT (fils d’Alexis et de Marie PETIT) s’est marié avec Angèle POUILLOUX (fille de Louis et Christine PINGAULT). En 1888, il a 19 ans, elle en a 17. Où et quand se sont-ils mariés ? Mystère.

Le roman familial dit que leur premier enfant, Ermeline (grand tante de M. BOLCATTO), serait née sur le bateau.

Quand sont-ils partis ?

Sachant que les PARADOT et les POUILLOUX figurent sur les recensements de Chaunay jusqu’en 1886 ; que la dernière née des POUILLOUX est née à Chaunay en octobre 1887, à l’évidence, ils ne sont partis qu’à compter de 1888.

Pourquoi ?

Pourquoi un charpentier et un tisserand de Chaunay et leurs familles ont-ils émigré au Paraguay ? La réponse a traversé les époques et reste toujours d’actualité. On quitte son pays en quête d’un avenir meilleur, d’un eldorado.

Ces familles comme tant d’autres, étaient « appâtées » par un recruteur d’une des nombreuses agences de migration qui avaient passé contrat avec les gouvernements des Amériques (USA, Canada, Mexique, Brésil, Argentine, Paraguay, Chili….).

Dans le cas du Paraguay, la main d’œuvre étrangère était nécessaire pour développer le pays dévasté par 5 années de guerre. A cette époque, la coupe d’arbres pour les vendre en Europe était une des activités principales des colons dans toute cette région d’Amérique.

Comment ?

De quel port sont-ils partis et sur quel bateau ? Ils sont très certainement partis de Bordeaux (nos recherches sont en cours). La traversée durait alors entre 3 et 4 semaines. Pour traverser l’Atlantique Sud, les navires descendaient jusqu’à Dakar avant de rejoindre le Brésil. De là, ils redescendaient vers l’Uruguay pour terminer le voyage à Buenos Aires (Argentine). Ensuite, un bateau-vapeur remontait le rio Parana jusqu’au Paraguay.

Que s’est-il passé là-bas ?

Selon l’histoire familiale, Alexis PARADOT père, est décédé dans la forêt, écrasé par un arbre qu’il venait de couper. La famille (ou une partie de celle-ci) est restée au Paraguay au moins pendant 3 ans de plus car l’un des frères du grand père de M. BOLCATTO-PARADOT y est né en 1895 et a été inscrit au consulat de France à Asunciòn.

La veuve d’Alexis PARADOT, Marie PETIT, est revenue à Chaunay puisqu’elle réapparaît sur le recensement de Chaunay en 1896. Elle vit au « Fouilloux » (Chaunay) avec sa mère Jeanne MASSON qui meurt en 1901. Marie PETIT meurt en 1915 à Chaunay.

Des membres de la famille PARADOT se sont ensuite dispersés entre le Chili et l’Argentine.

généalogie, familles PARADOT et POUILLOUX de Chaunay, Vienne 86, au Paraguay

Familles PARADOT et POUILLOUX exilées au Paraguay ▲ clic sur l’image pour l’agrandir


Le PLUS à consultervous trouverez de nombreux documents sur la colonie agricole constituée par 400 français du sud-ouest partis de Bordeaux en 1855, qui s’installera près de la capitale paraguayenne Asunción. Cette émigration, qui a eu lieu dans un contexte historique particulier, est antérieure à celle de nos Chaunaisiens mais peut expliquer leurs motivations.

1 Centre de Recherches Historiques sur les Sociétés et Cultures de l’Ouest Européen

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