A partir de la seconde moitié du XVIIe siècle, au moins une cinquantaine de Loudunais, ont traversé l’Atlantique pour s’établir en Nouvelle-France et ainsi contribuer à son peuplement.
Parmi eux, cinq personnes sont originaires d’Angliers.
La Nouvelle-France au XVIIe siècle
En 1663, Louis XIV reprend en main la Nouvelle-France que son père, Louis XIII, avait laissée en 1627 à la Compagnie des Cent-Associés. Il institue le « Conseil souverain » de la Nouvelle-France composé d’un gouverneur, d’un intendant, d’un évêque et de quelques conseillers.
La première personne à occuper le poste d’intendant, est Jean TALON, homme particulièrement efficace pour le développement de la colonie. Dès son arrivée, il fait un recensement général de la colonie. Son constat : c’est une population est très jeune et majoritairement masculine. Il va mettre sur pied une politique démographique en favorisant l’immigration, mais il manque surtout des épouses.
Les autorités françaises collaborent et envoient dans les années suivantes environ 1 000 jeunes filles, principalement des orphelines, que l’on nommera les « filles du Roy ». Il favorise également l’émigration d’agriculteurs vers la Nouvelle-France en finançant la traversée des familles. Il encourage aussi les ouvriers et artisans à s’engager, ce qui permet de recruter bon nombre de gens qualifiés. Enfin, le roi assure la sécurité de la colonie en envoyant un régiment complet pour pacifier les indiens Iroquois : il s’agit du régiment de Carignan-Salières, composé de 1 200 hommes. Jean TALON obtient que les soldats qui le désirent, puissent s’établir comme colon à la fin de leur service. Environ 400 d’entre eux choisirent cette option.
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Arrivé en Nouvelle France, le paysan qui désire trouver du travail se loue dans un contrat notarié, pour une période généralement de trois années, à un « maître » qui s’engage à le nourrir, à le loger et à l’assister. Pendant le terme du contrat, l’engagé n’est pas libre de travailler à son compte ; il n’est qu’une force de travail susceptible en tout temps d’être cédée à un tiers. Louis de BUADE de FRONTENAC, gouverneur général de la Nouvelle-France, définit l’engagé comme « un homme tenu d’aller partout et faire ce que son maître lui demande, comme un esclave, durant le temps de son engagement« .
Le gouvernement de Nouvelle-France a la responsabilité du peuplement, mais ce sont plutôt des individus ou des communautés religieuses, en quête de main-d’œuvre, qui embauchent pour défricher leurs domaines. Les recruteurs et surtout les marchands et armateurs de La Rochelle ont convaincu plusieurs personnes de tenter la grande aventure. Les promesses sont alléchantes : un pays où le travail ne manque jamais, où les impôts sont minimes et où chacun peut s’accaparer facilement de terres plus belles et beaucoup plus vastes que celles que l’on peut espérer trouver en France.
René FILLASTREAU
Originaire du lieu-dit de Saint-Antoine à Angliers, René FILLASTREAU est déjà à Québec en 1655. Il s’établit à Montréal en 1658 où il fera un peu d’élevage et d’agriculture en plus de son activité de scieur le long. Il est aussi de la toute première génération des « coureurs de bois », c’est à dire de ces aventuriers qui se rendent en canot d’écorce dans les tribus amérindiennes pour y faire la traite des fourrures.
Pierre LORIN et son épouse Françoise HULLIN
En 1655, un commissionnaire mandaté par Nicolas LE VIEUX de HAUTEVILLE réussit à convaincre un cousin de FILLASTREAU, Pierre LORIN (1628 – 1685), dit « Lachapelle » (existe-t-il un lien avec la Chapelle Bellouin ?), et sa jeune épouse, Françoise HULLIN, de s’occuper d’une terre que Nicolas LE VIEUX vient d’acquérir en banlieue de Québec. Pierre LORIN accepte les conditions du bail à ferme, contracte un emprunt et s’embarque accompagné de son épouse, pour la Nouvelle-France.
Le couple suivra ensuite FILLASTREAU à Montréal où Pierre LORIN sera scieur de long. Françoise HULLIN décède prématurément en 1658, Pierre se remarie l’année suivante avec Françoise SAULNIER (°1638 †1710), une parisienne recrutée par les prêtres de Saint-Sulpice de Paris. Pierre LORIN fera l’acquisition de plusieurs terres à Montréal qu’il revendra après les avoir défrichées et vendu le bois sous forme de planches et de madriers. Malgré tous leurs efforts, Pierre LORIN et son épouse vivront plusieurs difficultés notamment d’ordre pécuniaire.
Laurent et Mathurin GOUIN
Les frères Laurent (°1636 †1686) et Mathurin (°1635 †1695) GOUIN, cousins de FILLASTREAU et de LORIN, étaient les fils aînés d’une famille de laboureurs installée vers Rossay-Le Bouchet dans les années 1636 – 1648. La famille GOUIN s’est ensuite établie à Angliers d’où les GOUIN se disent originaires à plusieurs reprises. Ceux-ci s’engagèrent à La Rochelle en 1657 pour travailler pendant trois ans en Nouvelle-France. Ils reçurent ensuite chacun une concession à Champlain, en aval de Trois-Rivières où Laurent vivra paisiblement sans enfants jusqu’à sa mort.
Son frère Mathurin ira définitivement s’installer en 1670 plus loin, vers Québec dans la Seigneurie de Sainte-Anne de la Pérade. C’est un défricheur et un travailleur habile, acharné et physiquement très fort qui saura rapidement devenir un propriétaire foncier des plus prospère. Ce fut un homme exceptionnel chez qui par exemple habiteront longtemps un des co-seigneurs du lieu ainsi que le curé de la paroisse. C’est aussi chez Mathurin GOUIN que s’arrêtent, lors de leurs visites diocèses, Monseigneur François de MONTMORENCY-LAVAL et son successeur Monseigneur de SAINT-VALLIER.
Mathurin saura en outre à la fois devenir le créancier et l’exécuteur testamentaire des co-seigneurs de Sainte-Anne de la Pérade tout en recevant à plusieurs reprises des marques de haute estime de la part de ses pairs, les autres censitaires.
Un des descendants de Mathurin GOUIN, Sir Lomer GOUIN, fut 15 ans Premier ministre du Québec et Lieutenant – Gouverneur du Québec. Il fonda en 1919 un village auquel il donna le nom d’Angliers en souvenir du lieu de provenance de son ancêtre.
Sources :
- « Quatre cousins loudunais en Nouvelle-France. Histoire des ancêtres Fillastreau, Lorin et Gouin »; par Robert LARIN, édition le Méridien, Montréal, 1992
- Wikipédia : articles Nouvelle-France