Cimetière de Boisgrollier à Rouillé © Sandrine POURRAGEAU
Des cimetières, il y en a partout à Boisgrollier depuis le 18ème siècle, conséquence de l’interdiction d’inhumation dans les cimetières catholiques, du Roi Louis XIV, dans sa lutte contre les protestants pour faire disparaître cette religion. Pour ce faire, il révoqua l’Edit de Nantes en signant l’Edit de Fontainebleau, le 22 octobre 1685. Le protestantisme devenait dès lors, interdit sur le territoire français.
Pendant cette période difficile, les protestants « opiniâtres » étaient enterrés clandestinement dans un coin de jardin, de pré ou de vigne et rien ne signalait leur tombe. Mais à partir de 1736, l’inhumation fut autorisée, à condition « qu’elle se fasse de nuit et sans scandale ! » Ainsi, les protestants n’ont plus eu à dissimuler les lieux de sépultures de leurs défunts et les cimetières de famille se multiplièrent.
A Boisgrollier, village situé sur la commune de Rouillé, à la limite de la Vienne et des Deux-Sèvres, les cimetières familiaux protestants font partie du paysage. Dans ce village d’environ 10 maisons, il n’y a pas moins de 8 cimetières, dont un très grand de plus de 56 tombes (celui-ci ayant fait l’objet d’un « relooking » grâce à la joyeuse et courageuse équipe du Cercle Généalogique Poitevin ). On peut dire, que dans ce coin reculé du Poitou, la mort fait partie de la vie. Certains pourraient en être effrayés surtout à notre époque où on a plutôt tendance à l’ignorer voire même la mépriser.
La « grande faucheuse » selon l’expression populaire, est omniprésente à Boisgrollier, mais faut-il s’en offusquer ? Le rapport à la mort m’est plutôt familier. Est-ce le fait d’avoir depuis toujours, dans ma famille maternelle et paternelle, côtoyé cet environnement très caractéristique qu’est celui des cimetières familiaux protestants ?
Fête des morts au Mexique © Pholo Claude ALLARD
Lors de mon voyage au Mexique, j’ai découvert des pratiques très inhabituelles. Les Mexicains ont un rapport à la mort qui interpelle. C’est pour eux un fait culturel qui remonte aux civilisations précolombiennes. Les rituels de sacrifices humains nous paraissent monstrueux : c’était leur façon d’adorer les dieux. Chaque année, à la Toussaint, le 2 novembre, c’est jour de fête pendant lequel règne la joie. On partage ce moment avec le mort au cimetière, en mangeant et buvant sur la tombe ouverte (si la personne est décédée depuis plus d’un an) et le tout en musique !
La fête des morts dans nos contrées est bien moins festive, mais en pays protestant, on la côtoie au quotidien, puisqu’elle se situe dans notre champ de vision. On vit avec la mort. Consciente que peu de personnes connaissent cette particularité du paysage protestant poitevin, j’ai eu l’occasion d’emmener un groupe d’amis visiter mon petit village de Boisgrollier. A la découverte des cimetières plus ou moins bien entretenus, et notamment un cimetière de 50 tombes, leur réaction a été unanime : « Il faut faire quelque chose ! on ne peut pas le laisser à l’abandon, par respect pour les personnes enterrées dans ce lieu ». Lieu très sinistre, lorsque l’on voit son état.
Afin de clore ce propos qui peut paraître dérangeant pour certains et pour rassurer ceux que la mort rebute, voici une citation humoristique de Samuel Langhorne Clemens, dit Mark Twain, (Tom Sawyer) écrivain essayiste et humoriste américain : « Parmi les dépenses inutiles : les murs des cimetières….ceux qui sont dedans ne peuvent pas en sortir et ceux qui sont à l’extérieur, ne veulent pas y entrer »
Sauvegarde du patrimoine
Dans le numéro 140 de la revue Herage, j’ai raconté comment cinq membres du Cercle Généalogique Poitevin ont remis en lumière le cimetière des 50 tombes de protestants inhumés à Boisgrollier.
Récapitulatif des tombes de Boisgrollier
(clic sur les images pour agrandir)
Ci-dessous cartographie des lieux cités au cours de ce Challenge AZ.
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