#ChallengeAZ │ U… Université de Poitiers, portraits de docteurs en médecine

Dans les cartons des Archives Départementale de la Vienne (AD86) on trouve une série de portraits inachevés sur velin, il y en a huit en tout (sources AD86 carton 27).

Un chercheur historien, ayant écrit un article sur ces peintures paru dans une des brochures de la Société des Antiquaires de l’Ouest (la SAO), date et identifie les personnages. Premièrement il y a une délibération de 1621 de l’université de médecine de Poitiers fixant la période et dans laquelle il y est dit que les docteurs régents en médecine avaient le droit d’avoir leur portrait dans un livre sur les règlements de cette université de médecine, livre qui était en cours de rédaction. Selon le rédacteur de l’article, on peut attribuer un nom aux quatre personnages dont le portrait est complet ou presque.

  • Pour la deuxième photo, celle d’un personnage fini à gauche et un personnage incomplet à droite, il s’agit de Jacob DE MAYRE.
  • Sur la troisième photo, celle avec le personnage complet à droite, il s’agit de Jean DE RAFFOU,
  • Sur la dernière avec les deux personnages complets, il s’agit de gauche à droite de Pascal LE COCQ l’herboriste et de François CYTOIS.

Les personnages peints ont une hauteur d’une douzaine de centimètres, c’est un travail fin, délicat, proche de la miniature et fait avec soin par quelqu’un qui maîtrise son art. L’artiste n’a pas oublié les emblèmes symboles de leur charge, comme la fleur pour l’herboriste.

On a donc là les portraits complets de quatre docteurs en médecine.

  • Jacob DE MAYRE est fils de Mathurin DE MAYRE sieur de la Randonnière et de Marie PINAULT. Il est docteur en médecine de la faculté de Montpellier et a été reçu régent de la faculté de Poitiers le 10-06-1607. Il est marié avec Marguerite GARSONNET, fille de Henry GARSONNET maître apothicaire et de Jeanne ESNAULT. Il a une fille Jeanne épouse de Louis DELESTANG seigneur du Ry (mariage en 1630).
  • Pascal LE COCQ lui est fils d’Aymar LE COCQ et de Jeanne DUBOIS. Il s’est spécialisé dans la botanique. Il a parcouru l’Europe à l’étude de la flore. Il est nommé régent de la faculté de Poitiers en 1597. Il est l’époux de Françoise DE SAINT-VERTUNIEN, fille de François DE SAINT-VERTUNIEN et de Françoise BESNARD. Il a eu au moins sept enfants. Il meurt en 1632 avec le titre de Doyen de la Faculté de Médecine de Poitiers.
  • Jean DE RAFFOU a fait ses études de médecine à Paris puis à Poitiers. Il devient docteur de la faculté de Poitiers en 1608. Il est fils de Pierre DE RAFFOU et de Julienne BLONDEAU. Il décède à Poitiers en 1635 à 51 ans. Il avait épousé Marie CONTANT fille de Paul CONTANT et de Marie Esther PELLETIER, il a eu deux enfants.
  • François CYTOIS, docteur en médecine, a eu un destin plus grand que les précédents. Il est le fils de Pierre CYTOIS et de Mathurine GIRAULT. Il quitte Poitiers pour devenir le médecin de RICHELIEU et du roi Louis XIII. Il s’est marié deux fois : sa première épouse s’appelle Marie GODARD, la deuxième épouse s’appelle Madeleine JOULAIN,. Il est noté dans une insinuation de 1627 «François Cytois, médecin du Roi et de la Reine, mère du Roi, et Madeleine Joulain, demeurant à Paris rue « Courtoris », paroisse Saint-Eustache : donation à François, à Joseph, à Jean et à Isabeau Cytois, enfantz d’un premier mariage dudit François Cytois de tous leurs biens meubles et des acquêts et conquêts immeubles qu’ils auront faits durant et constant leur mariage» (Notice n° 7034)  (sources Archives Nationales : Châtelet de Paris. Y//163-Y//167. Insinuations (28 juin 1622 – 11 mars 1628)).
    Pharmacie du marché, place Charles de Gaulle, Poitiers, Famille Citoys

    Façade actuelle de l’ancienne boutique d’apothicaire des Citoys, sise place Charles de Gaulle à Poitiers. © Google Maps


    Dans la première partie de sa vie François CYTOIS a du vivre en la maison dite des « Cytois » située en haut de la Grand-Rue à Poitiers le long de l’église Notre-Dame-la-Grande. La façade de cette maison date de 1573-1574, il existe une minute datée de fin 1573 concernant la construction d’une nouvelle façade en pignon à l’édifice, avec des fenêtres à meneaux, le plan de cette façade que l’on trouve avec l’acte permet sans équivoque d’identifier la maison. Le bâtiment lui même est bien plus ancien. Aujourd’hui une pharmacie occupe le rez-de-chaussée, probablement dans la continuité d’une boutique d’apothicaire datant d’avant 1600.

 

Le peintre auteur des portraits ?

Le rédacteur de l’article publié par la SAO n’a pas identifié l’auteur des portraits, ni expliqué pourquoi ceux-ci sont inachevés. A Poitiers au début du 17ème siècle un peintre Pierre LEPILLEUR est connu et apprécié localement, il a été sollicité plusieurs fois pour des rénovations et des productions de tableaux par les congrégations religieuses et les autorités. Dans les registres paroissiaux il se fait remarquer par sa signature très expressive.

© AD86 – registres paroissiaux, Poitiers-St-Cybard-B-1603-1611 collection communale vue 46

L’examen des parties inachevées des portraits, en particulier les esquisse au crayon non peintes on remarque au niveau des mains que les doigts sont allongés et rebiquent vers le haut.

Le tracé des doigts esquissés, même s’ils sont très petits proportionnellement, fait penser à ceux de la signature, long effilés et qui rebiquent vers le haut. Pierre LEPILLEUR est marié avec Françoise DEMARNEF. Radegonde DEMARNEF sa tante est mariée avec Thomas GARNIER un apothicaire, dont un petit fils Jean GARNIER, docteur en médecine de Montpellier, issu du premier mariage de ce Thomas GARNIER apothicaire, est admis à la faculté de médecine de Poitiers après examen en 1621. Pierre LEPILLEUR doit être le réalisateur des portraits, il est décédé en 1620, ce qui explique parfaitement le côté inachevé des images. Un nouveau docteur intronisé devant payer un repas aux régents de la faculté de médecine, le père de Jean GARNIER a pu « offrir » aux régents en plus du repas leurs portraits en s’adressant à un peintre, un de ses proches parents, pour faciliter la carrière de son fils. Le couple LEPILLEUR x DEMARNEF a eu six enfants tous baptisés en l’église de St-Cybard de Poitiers, entre 1608 et 1619.

 

#ChallengeAZ │ T… des Terres pour les écoles de Sérigny

Sérigny, Vienne

Vue aérienne de Sérigny (86) © GoogleMaps

J’ai toujours entendu dire que ma grand-mère était allée à l’école « chez les sœurs », comme on disait. Voilà qu’après quelques recherches sur la commune de Sérigny je découvre qu’il y avait bien une école religieuse (pour les filles) crée par Mme VENAULT de la FOUCHARDIERE.

 Le 17 juin 1869 Mr le curé GUYOT demande l’autorisation à Monseigneur d’ouvrir une école avec deux religieuses, « une pour instruire les petites filles et l’autre pour visiter les malades ». Il a l’espoir par la suite de faire venir deux frères pour éduquer les garçons mais cela ne se fera pas car il existe déjà une école laïque pour les garçons.

Le 8 mai 1869 est rédigé un acte notarié de donation fait par Marie Louise Anne Victoire de la FOUCHARDIERE épouse autorisée de Charles Antoine VENAU à la congrégation de Saint Martin de Bourgueil pour la somme de 125 f. La donation est acceptée par Napoleon.

En octobre 1871 Mr le curé demande le changement des religieuses suite à des commérages qui altèrent les bonnes relations avec ses paroissiens et les deux nouvelles arrivent quelques jours plus tard.

Au recensement de 1872 est citée Françoise CHEVRAULT, religieuse qui soigne les malades, et Jeanne DAVID, institutrice, et à celui de 1876 une troisième sœur Louise PIMBERT ainsi que quatre pensionnaires.

En décembre 1882 la supérieure de la congrégation de Saint Martin de Bourgueil « est autorisée à vendre à la Dame veuve VENEAU moyennant le prix de 2500 francs […] une pièce de terre sise à Sérigny sur laquelle est élevée une construction autrefois affectée à usage d’école provenant d’une donation faite par la dite Dame VENEAU. »

Dans les délibérations du conseil municipal du 24 mai 1905 Mr le Maire communique deux lettres de l’inspecteur primaire : 

  • La première précise que l’école publique jusqu’alors spéciale aux garçons sera transformée en école mixte après la fermeture de l’école privée.
  • La seconde exige de faire exécuter les travaux nécessaires afin de la rendre convenable.

En 1934 l’école religieuse compte 35 élèves et en 1954 il n’y en a plus que  22 élèves. Elle fermera quelques années plus tard, peut-être en 1958 car cette année-là il y a deux  écoles publiques mixtes une au bourg et l’autre à 5 km, à la Belle-Indienne.

En 1875 la commune fait l’acquisition d’un terrain situé au lieu-dit La Boissellerie, près du village de Gençay, pour y établir une école de hameau, d’une superficie de 8 ares pour le prix de 300 fr. Le terrain appartenant à Mr LECOMTE Louis Taillefer, beau-frère de ma sosa 23.

 

En 1910, François LEBLANC loue pour 12 années 5 ares 28 de terre labourable destinée à faire un jardin pour l’école du hameau de Gençay située au lieu-dit La Belle-Indienne (1) « moyennant le prix annuel de 8 f »

Ce Francois LEBLANC n’est autre qu’un grand oncle, frère de ma grand-mère. Et c’est ainsi qu’en cherchant l’origine de l’école fréquentée par ma grand-mère que je découvre l’implication d’un proche dans la vie du hameau berceau de ma famille.

(1) L’école de la Belle Indienne était toujours en activité l’été dernier.

Sources : archives départementales de la Vienne et archives diocésaines de Poitiers.

#ChallengeAZ │ S… des Sources pour l’école

Pour étoffer l’histoire familiale, il faut savoir sortir des sentiers battus. Lorsqu’on débute sa généalogie, il est plaisant voire grisant de collecter les dates et lieux de naissances, mariages et décès de nos ancêtres et de sauter ainsi de branches en branches pour compléter les feuilles de notre arbre généalogique. Mais très vite cela ne suffit plus et nous nous attardons sur des détails qui aiguisent notre curiosité et nous incitent à approfondir nos recherches vers d’autres sources que les seuls actes paroissiaux ou d’état civil.

Nous avons la chance en France de disposer d’énormément de ressources en ligne mais tout n’est pas numérisé et disponible sur internet. C’est pour cela qu’il est important de sortir de chez soi pour visiter les services d’archives et découvrir tous les documents mis à notre disposition.

Nous allons nous interroger sur les conditions de vie et suivre les lieux de vie de nos ancêtres grâce aux recensements, comprendre pourquoi ils ont dû quitter le berceau familial pour d’autres horizons, suivre un parcours militaire, imaginer leurs conditions de vie à travers des actes notariés. Nous voudrons en savoir plus sur leur métier, reconstituer l’histoire de leur maison, resituer leur histoire dans la Grande Histoire.

La participation au Challenge AZ sur le thème de l’école, me donne l’occasion de partager avec vous la découverte de deux documents auxquels nous avons eu accès pour la préparation de l’exposition sur les parcours de vie des instituteurs de la Vienne présentée lors des journées d’échange de Bignoux en 2018. Nos recherches ont portées sur la période 1914-1920.

Les bulletins de l’association amicale des anciens élèves de l’école d’instituteurs de Poitiers

Couverture janvier 1912 ▲ clic pour agrandir l’image

L’association a été créée en 1901 avec pour objectif l’aide et la solidarité entre anciens élèves de l’école normale et publiait des bulletins trimestriels. On peut consulter les bulletins édités à partir de 1907 à la médiathèque François Mitterrand de Poitiers ou aux Archives départementales de la Vienne. Les deux collections se complètent. Pour la période plus récente, il faut s’adresser à l’association qui existe toujours.
L’amicale des anciennes élèves de l’école normale d’institutrice éditait également son propre bulletin. Les deux associations n’en font plus qu’une aujourd’hui qui est devenue « La normalienne« .

Si vous avez des recherches à faire sur cette période sur un membre de l’enseignement (instituteur, inspecteur) qui est passé par l’école normale de Poitiers, il se peut que son nom apparaisse dans ces bulletins.

On y trouve les nominations et mutations mais également les avis de mariages des instituteurs, la naissance de leurs enfants, leur départ en retraite et bien sûr des hommages lors de leurs décès.

Nominations et mutations publiées dans le bulletin d’octobre 1911

Rubrique nécrologie, avril 1910

La consultation de ces bulletins nous a permis de découvrir des photos des instituteurs Morts pour la France ainsi que leur nécrologie bien souvent émouvante. Pendant toute la période du conflit, l’association des anciens élèves par le biais de son  bulletin a fait office de lien avec les familles et les autres camarades en donnant des nouvelles de ceux qui étaient partis au front.

Hommage à François DEFIOLLE, instituteur aux Hérolles, mort pour la France le 17 juin 1915, publié dans le bulletin d’août-sept 1915 ▲ clic pour agrandir l’image

On y trouve aussi des réflexions sur l’évolution de l’enseignement, des prises de position sur les conditions de travail mais aussi des textes plus légers comme des chants ou des poèmes. Aimé SOUCHÉ cité dans un autre article du challenge a régulièrement collaboré en proposant des textes tout comme d’autres instituteurs qui sont à de nombreuses reprises sollicités pour communiquer leurs articles. Peut être votre ancêtre instituteur a-t-il été l’auteur d’une rubrique dans ces bulletins ?

Annuaire des postes de l’enseignement primaire de la Vienne (1938).

Cet annuaire m’a été remis par une adhérente du Cercle généalogique poitevin qui le tenait de son père instituteur.

Cet annuaire était édité par la section syndicale de la Vienne du syndicat national de l’enseignement. Il recense des informations communiquées par les instituteurs et institutrices du département avec le concours de l’inspecteur d’Académie, le secrétaire de l’inspection académique et des inspecteurs primaires. Cet annuaire était donc distribué aux instituteurs et il leur servait à préparer leur mutation. Certes il n’y a pas de photos mais le descriptif était suffisant pour avoir une idée de ce qui les attendait.

Toutes les écoles sont regroupées par canton puis par communes et on y distingue les écoles de garçons et de filles.

Pour chaque commune, en préambule, on y précise le nombre d’habitant, l’éloignement par rapport aux communes limitrophes, l’existence d’une gare, des commerces et médecin à proximité, le passage des marchants ambulants et jusqu’à l’existence du lavoir ou d’une fontaine. On y indique également la présence des hôtels, des pharmacies et parfois même le prix de la visite du médecin.

Pour chaque école, outre la situation géographique, on y décrit le nombre et la dimension des salles de classe et du préau ainsi que leur état, le nombre d’élèves et le niveau de fréquentation. On mentionne également la présence du poêle à bois, des sanitaires pour les élèves. On précise s’il existe une bibliothèque avec le nombre de volumes à disposition, une salle de jeu, une cantine avec cuisine ou réfectoire.

Enfin, on détaille le logement de l’instituteur en précisant le nombre de pièces et leur dimension, l’exposition du logement (ensoleillé ou pas), l’état du logement et parfois de sa toiture, l’existence d’une cheminée, de placards ou du cabinet de toilette. On mentionne la présence d’un puits, d’un jardin avec le type de plantation d’arbres existants, d’un garage et du bûcher.

En interrogeant des familles d’instituteurs, peut être auront-elles conservées ce type de document dans votre département. Peut-être en trouverez-vous dans des brocantes parmi des vieux papiers.

En conclusion, quand on fait de la généalogie il faut savoir être curieux, collecter, répertorier et sécuriser toutes les données qui tombent sous nos yeux. Tout peut servir à un moment donné pour soi-même et pour les autres car faire de la généalogie c’est aussi partager et transmettre.

Vous trouverez ci-dessous les panneaux qui ont été exposés à Bignoux. Nous avons ainsi illustrer, à travers différentes sources, des parcours de vie de quelques instituteurs de la Vienne Morts pour la France.

Parcours de vie d’Arthur BACHE, né en 1887 à St Savin, décédé en 1917 à Courcy (Marne), instituteur de 1907 à 1917 à Brigueil-le-Chantre, Saint-Pierre-les-Eglises, Rouillé et Benassay.

Parcours de vie de Georges GENDREAU, né en 1884 à Civray, décédé en 1918 à Ressons-sur-Matz (Oise), instituteur de 1903 à 1918 à Savigné et La Puye.

Parcours de vie de Ferdinand PLAUD, né en 1881 à Paizay-le-Sec, décédé en 1916 dans les combats de la cote 304 à Esnes (Meuse), instituteur de 1901 à 1916 à Journet, Persac, Queaux, Saint-Georges-les-Baillargeaux et Migné-Auxances

Ce travail de recherches et de présentation a été réalisé par l’équipe chargée des expositions du Cercle généalogique Poitevin. Je remercie Claudie BOURREAU, Maryse BOBIN, Sandrine POURRAGEAU et Michèle POUSSARD qui m’accompagnent dans cette aventure et qui contribuent chacune à la réussite de ces expositions. Je profite de cet article pour remercier également tous les adhérents qui nous ont soutenu et qui nous ont fourni énormément de documents dont une belle galerie de cartes postales des écoles et de photos de classes de la Vienne. Tous ces documents sont numérisés et peuvent être communiqués sur demande (atelier_ecriture@herage.org).

#ChallengeAZ │ R… Regard sur l’histoire de mon collège

Au début de l’été, j’ai accompagné mon père à une réunion du groupe d’écriture du Cercle Généalogique Poitevin, à propos du « Challenge AZ ». Le sujet étant « l’école », je me suis dit que je pourrais éventuellement écrire quelques lignes, sur l’établissement que je viens de quitter, cette année. J’ai effectué mes quatre années de collège à l’Institution Catholique Saint-Martial à Montmorillon. J’avais vaguement entendu parler de la création de cet établissement. J’avais retenu que les bâtiments de l’école étaient issus d’une donation d’une personne importante. C’est pourquoi poussée par ma curiosité, j’ai cherché à en savoir davantage sur ce mystère.

 1 – L’origine des bâtiments

Au cours de la dernière journée du patrimoine, une ballade commentée dans Montmorillon, m’a permis de découvrir l’hôtel particulier du Chastenet, situé dans l’ancien quartier et faubourg de la Cueille, actuelle rue d’Ypres. Cela a été l’occasion d’être reçue par le propriétaire des lieux, monsieur Guillaume de RUSSÉ, ancien maire de Montmorillon et actuel président délégué au conseil départemental de la Vienne (cousin généalogique selon mon père aux 10e et 14e degrés par le couple François DEMAILLASSON et Marie RICHARD). Cet élu nous a expliqué l’histoire de sa maison édifiée vers 1640, par le 5e sénéchal de Montmorillon Jean du CHASTENET, dont cet hôtel particulier porte le nom.

Mais ce qui nous intéresse, ce sont les bâtiments attenants d’un autre hôtel particulier, côté ouest, qui sont construits un siècle plus tard, par le 8e sénéchal de Montmorillon Claude Louis MICHEAU du MESLIER. Ce nouveau bâtiment présente lui aussi une cour à l’avant à laquelle on accède par un porche. Un vaste parc sur l’arrière existait autrefois, aujourd’hui remplacé par une cour goudronnée. De conception et d’architecture plus évoluées que l’hôtel voisin, il prend le nom de « logis neuf » et par conséquent celui du Chastenet devient le « vieux logis », l’ensemble des bâtiments étant tombé dans une même famille, au fil des unions et successions.

 2 – L’histoire de l’Institution Saint-Martial de Montmorillon

A l’initiative de la famille AUGIER de MOUSSAC, un accord fut conclu le 11 octobre 1851 avec la communauté de Saint-Charles d’Angers, permettant la création d’un ouvrier (travaux manuels), d’un dispensaire (soins des malades) et d’une école de filles. Dès décembre 1851, les trois sœurs de la Congrégation de Saint-Charles arrivent et s’installent Place du Champ de Foire. En 1853, un asile (classe maternelle) est ouvert.

En 1861, devant le succès de cette entreprise, et pour lui donner une plus grande stabilité, la famille AUGIER de MOUSSAC céda à la congrégation les salles du « logis neuf ». En 1863, les locaux sont occupés par l’école de filles et l’aide aux pauvres.

En  juillet 1902, l’école primaire et l’Asile sont fermés, mais les sœurs continuent de donner des leçons particulières pendant toute l’année. Cinq sœurs sur dix restent dans la dite ville, hébergées par la population.

En 1942, les Sœurs reprennent officiellement l’habit religieux et leur nom de communauté. On compte à cette époque 350 élèves dont 75 pensionnaires.

En 1951, M. CHESSERON, archiprêtre de Montmorillon, achète au nom de la société immobilière du Poitou, la maison contiguë à l’école technique pour agrandir les locaux et y installer un cours de comptabilité. Le 26 avril 1952 est célébré le centenaire de l’école, en présence de monseigneur VION, évêque de Poitiers.

En septembre 1972, l’école de filles fusionne avec l’école de garçons Saint-Joseph pour permettre d’assurer la mixité dans les classes du primaire.

En 1978, le cours complémentaire privé mixte devient collège privé mixte Saint-Martial, du nom de la dite paroisse locale. La section technique entame un processus de fermeture sur trois ans. La Congrégation de Saint-Charles se retire et cède la direction de l’établissement aux laïcs.

Aujourd’hui, l’établissement privé catholique est sous la tutelle du comité diocésain de l’enseignement catholique, responsable des archives de l’établissement. L’institution Saint-Martial est formée d’une école maternelle, d’une école primaire et d’un collège. L’école a fêté ses 168 ans.

Cour intérieure du collège avec sa chapelle dans l’angle à gauche

3 – La famille AUGIER de MOUSSAC à l’origine de cette école

Les AUGIER ont toujours occupé en Poitou et particulièrement à Montmorillon une place importante. Cette famille a su accéder aux plus importantes charges en la dite sénéchaussée, au fil des siècles et s’est faite remarquée aussi par ses nombreux religieux, notamment par Félix Paul Laurent (1753-1827), abbé de Moussac, prévôt du chapitre de Notre-Dame de Montmorillon et vicaire général du diocèse de Poitiers, inhumé dans le chœur de la chapelle Saint-Laurent. Félix AUGIER ajouta à son nom patronymique celui de MOUSSAC, nom d’une terre située à 3 km de Montmorillon, où cette famille aisée possédait des biens dès le XVIe siècle, en raison d’une charge de sénéchal à la Trimouille et Bélâbre (86) détenue par un autre Félix AUGIER (1560-1614). Je descends, selon les recherches de mon père, de l’un des frères de ce dernier, Jean marchand à Montmorillon.

Blason de la famille Augier de Moussac (Montmorillon) : D’or à trois croix de sable, pommetées par le haut et posées en pal

Sources : Montmorillon, histoire civile, Léopold Liège ; Journal de M. Demaillasson avocat du Roi ; Site Internet du collège Saint Martial ; Site Internet Wikipédia.

Nota : Camille est la plus jeune de nos contributeurs (15 ans). C’est à la fois plaisant et rassurant de voir une jeune fille se son âge s’intéresser à l’histoire locale d’autant plus qu’elle a une jolie plume. Son papa est un passionné de généalogie (ceci explique peut être cela) et la relève est assurée !

#ChallengeAZ │ Q… Querelle pour l’école de filles à Dissay

Dissay, Vienne 86

Dissay vue générale

En 1884 le Préfet de la Vienne, représentant de l’État, demande à la commune de Dissay la création d’une école publique de filles.

La municipalité traîne des pieds… Le 26 septembre 1884 le Conseil municipal a protesté (1) « … le besoin ne s’est pas fait sentir, la commune étant déjà largement dotée sous ce rapport » . [il y a une école tenue par les sœurs des Filles de la croix de St-André à La Puye]

Néanmoins, le 6 février 1885 le Maire répond au Préfet qu’il a cherché un local et propose « une vaste salle dépendant de la mairie et située au centre même de la commune, elle a servi de salle de classe pour les garçons jusqu’en 1880 ». Cette salle, plus une chambre pour l’institutrice, est mise gratuitement à disposition.

Dissay, Vienne 86

Lettre du maire de Dissay au Préfet de la Vienne,, 06 février 1885 © AD86 ▲ clic pour agrandir l’image

Mais de son côté l’Inspecteur a trouvé un autre local, plus grand : une maison à louer (500 francs par an), au Pont, en dehors du village, de l’autre côté de la rivière.
[Cette maison appartient à M. BUGEANT, qui se trouve être le père de l’instituteur;]

S’ensuit alors un échange de courriers avec le Préfet :
Le 26 février 1885 le Maire défend son projet « offert gratuitement » et « situé au centre du chef-lieu de la commune, et non entre deux auberges et un débit de vin dans un endroit isolé ».

Dissay, Vienne 86

Lettre du maire de Dissay au Préfet de la Vienne, 26 février 1885 © AD86 ▲ clic pour agrandir l’image

Le 3 mars 1885 c’est l’Inspecteur d’Académie qui conteste le choix du Maire « il est impossible d’y loger convenablement une institutrice et l’école communale de filles ».

Et il défend la proposition de l’Inspecteur primaire : « Monsieur le Maire parle de deux auberges, je n’ai vu qu’une maisonnette sans enseigne où un habitant vend du vin de sa récolte dans une petite pièce où quelques voyageurs s’arrêtent de temps en temps, surtout les dimanches » (!) 

Dissay, Vienne 86

Lettre de l’inspecteur d’académie au préfet de la Vienne, 03 mars 1885 © AD86 ▲ clic pour agrandir l’image

Mais il demande quand même au-dit Inspecteur primaire d’aller visiter sérieusement le local proposé par le Maire, puisque celui-ci lui transmet dès le 14 mars son compte-rendu de visite. 

Lettre de l’inspecteur primaire à l’inspecteur d’académie de la Vienne, 14 mars 1885, 1ère partie ©AD86 ▲ clic pour agrandir l’image

Lettre de l’inspecteur primaire à l’inspecteur d’académie de la Vienne, 14 mars 1885, 2e partie ©AD86  ▲ clic pour agrandir l’image

Donc : 14 mars 1885, compte-rendu très détaillé, suivi de la liste des inconvénients (page 3 de la lettre sus-dite).
1- l’instituteur devrait traverser la cour des filles pour arriver à son école, « ce qui n’est pas admissible »
2- la cour des garçons, amputée d’une partie, serait alors trop petite,
3- mais l’inconvénient le plus grave concerne le logement prévu pour l’institutrice, situé au 2ème étage : 
« Pour y arriver il faudrait monter par l’unique escalier qui, du rez-de-chaussée, conduit aux appartements de l’instituteur et de son adjoint. Quelle est la maîtresse soucieuse de sa réputation qui voudrait accepter une telle situation ! Ce serait déconsidérer et l’instituteur et l’institutrice. »

Il conclut en reconnaissant que ce serait une formule économique, « mais il est, ce me semble, une chose qu’on ne saurait payer trop cher : c’est la bonne réputation des maîtres de l’enfance, de ceux qui, à tous égards, doivent inspirer confiance aux familles et donner à leurs élèves l’exemple d’une conduite irréprochable et d’une moralité non suspecte. »

Comment cela s’est-il terminé ?

L’Inspection a obtenu gain de cause auprès du Préfet, la moralité de l’institutrice a été sauvegardée !
Le Maire a demandé à être déchargé de toute responsabilité concernant ce choix, et la maison près du pont a été louée 500 francs par an, pour une durée de 9 ans.

Au recensement de 1886 on y trouve l’institutrice, Marie LIÈGE et ses 3 enfants.

Mais, le 29 mars 1887 le Préfet a envoyé une lettre au Maire de Dissay : l’État ne peut plus payer… il faut acheter ou construire une école !

La mairie achètera donc une maison avec l’accord du Préfet, et ils obtiendront une subvention pour les travaux.