#ChallengeAZ │ U… Université de Poitiers, portraits de docteurs en médecine

Dans les cartons des Archives Départementale de la Vienne (AD86) on trouve une série de portraits inachevés sur velin, il y en a huit en tout (sources AD86 carton 27).

Un chercheur historien, ayant écrit un article sur ces peintures paru dans une des brochures de la Société des Antiquaires de l’Ouest (la SAO), date et identifie les personnages. Premièrement il y a une délibération de 1621 de l’université de médecine de Poitiers fixant la période et dans laquelle il y est dit que les docteurs régents en médecine avaient le droit d’avoir leur portrait dans un livre sur les règlements de cette université de médecine, livre qui était en cours de rédaction. Selon le rédacteur de l’article, on peut attribuer un nom aux quatre personnages dont le portrait est complet ou presque.

  • Pour la deuxième photo, celle d’un personnage fini à gauche et un personnage incomplet à droite, il s’agit de Jacob DE MAYRE.
  • Sur la troisième photo, celle avec le personnage complet à droite, il s’agit de Jean DE RAFFOU,
  • Sur la dernière avec les deux personnages complets, il s’agit de gauche à droite de Pascal LE COCQ l’herboriste et de François CYTOIS.

Les personnages peints ont une hauteur d’une douzaine de centimètres, c’est un travail fin, délicat, proche de la miniature et fait avec soin par quelqu’un qui maîtrise son art. L’artiste n’a pas oublié les emblèmes symboles de leur charge, comme la fleur pour l’herboriste.

On a donc là les portraits complets de quatre docteurs en médecine.

  • Jacob DE MAYRE est fils de Mathurin DE MAYRE sieur de la Randonnière et de Marie PINAULT. Il est docteur en médecine de la faculté de Montpellier et a été reçu régent de la faculté de Poitiers le 10-06-1607. Il est marié avec Marguerite GARSONNET, fille de Henry GARSONNET maître apothicaire et de Jeanne ESNAULT. Il a une fille Jeanne épouse de Louis DELESTANG seigneur du Ry (mariage en 1630).
  • Pascal LE COCQ lui est fils d’Aymar LE COCQ et de Jeanne DUBOIS. Il s’est spécialisé dans la botanique. Il a parcouru l’Europe à l’étude de la flore. Il est nommé régent de la faculté de Poitiers en 1597. Il est l’époux de Françoise DE SAINT-VERTUNIEN, fille de François DE SAINT-VERTUNIEN et de Françoise BESNARD. Il a eu au moins sept enfants. Il meurt en 1632 avec le titre de Doyen de la Faculté de Médecine de Poitiers.
  • Jean DE RAFFOU a fait ses études de médecine à Paris puis à Poitiers. Il devient docteur de la faculté de Poitiers en 1608. Il est fils de Pierre DE RAFFOU et de Julienne BLONDEAU. Il décède à Poitiers en 1635 à 51 ans. Il avait épousé Marie CONTANT fille de Paul CONTANT et de Marie Esther PELLETIER, il a eu deux enfants.
  • François CYTOIS, docteur en médecine, a eu un destin plus grand que les précédents. Il est le fils de Pierre CYTOIS et de Mathurine GIRAULT. Il quitte Poitiers pour devenir le médecin de RICHELIEU et du roi Louis XIII. Il s’est marié deux fois : sa première épouse s’appelle Marie GODARD, la deuxième épouse s’appelle Madeleine JOULAIN,. Il est noté dans une insinuation de 1627 «François Cytois, médecin du Roi et de la Reine, mère du Roi, et Madeleine Joulain, demeurant à Paris rue « Courtoris », paroisse Saint-Eustache : donation à François, à Joseph, à Jean et à Isabeau Cytois, enfantz d’un premier mariage dudit François Cytois de tous leurs biens meubles et des acquêts et conquêts immeubles qu’ils auront faits durant et constant leur mariage» (Notice n° 7034)  (sources Archives Nationales : Châtelet de Paris. Y//163-Y//167. Insinuations (28 juin 1622 – 11 mars 1628)).
    Pharmacie du marché, place Charles de Gaulle, Poitiers, Famille Citoys

    Façade actuelle de l’ancienne boutique d’apothicaire des Citoys, sise place Charles de Gaulle à Poitiers. © Google Maps


    Dans la première partie de sa vie François CYTOIS a du vivre en la maison dite des « Cytois » située en haut de la Grand-Rue à Poitiers le long de l’église Notre-Dame-la-Grande. La façade de cette maison date de 1573-1574, il existe une minute datée de fin 1573 concernant la construction d’une nouvelle façade en pignon à l’édifice, avec des fenêtres à meneaux, le plan de cette façade que l’on trouve avec l’acte permet sans équivoque d’identifier la maison. Le bâtiment lui même est bien plus ancien. Aujourd’hui une pharmacie occupe le rez-de-chaussée, probablement dans la continuité d’une boutique d’apothicaire datant d’avant 1600.

 

Le peintre auteur des portraits ?

Le rédacteur de l’article publié par la SAO n’a pas identifié l’auteur des portraits, ni expliqué pourquoi ceux-ci sont inachevés. A Poitiers au début du 17ème siècle un peintre Pierre LEPILLEUR est connu et apprécié localement, il a été sollicité plusieurs fois pour des rénovations et des productions de tableaux par les congrégations religieuses et les autorités. Dans les registres paroissiaux il se fait remarquer par sa signature très expressive.

© AD86 – registres paroissiaux, Poitiers-St-Cybard-B-1603-1611 collection communale vue 46

L’examen des parties inachevées des portraits, en particulier les esquisse au crayon non peintes on remarque au niveau des mains que les doigts sont allongés et rebiquent vers le haut.

Le tracé des doigts esquissés, même s’ils sont très petits proportionnellement, fait penser à ceux de la signature, long effilés et qui rebiquent vers le haut. Pierre LEPILLEUR est marié avec Françoise DEMARNEF. Radegonde DEMARNEF sa tante est mariée avec Thomas GARNIER un apothicaire, dont un petit fils Jean GARNIER, docteur en médecine de Montpellier, issu du premier mariage de ce Thomas GARNIER apothicaire, est admis à la faculté de médecine de Poitiers après examen en 1621. Pierre LEPILLEUR doit être le réalisateur des portraits, il est décédé en 1620, ce qui explique parfaitement le côté inachevé des images. Un nouveau docteur intronisé devant payer un repas aux régents de la faculté de médecine, le père de Jean GARNIER a pu « offrir » aux régents en plus du repas leurs portraits en s’adressant à un peintre, un de ses proches parents, pour faciliter la carrière de son fils. Le couple LEPILLEUR x DEMARNEF a eu six enfants tous baptisés en l’église de St-Cybard de Poitiers, entre 1608 et 1619.

 

#ChallengeAZ │ O… sous l’Occupation, fichage à Lavoux

Lavoux, Vienne,

Carte postale de la place de la mairie à Lavoux

Le document :

 

Dans la série 1-W-5579 aux Archives départementales de la Vienne (AD86) on trouve parmi d’autres documents une fiche de police datée du 05 novembre 1942, avec comme en-tête « MINISTERE DE L’INTERIEUR : Direction Générale de la Sécurité Nationale ». On est deux jours avant le franchissement de la ligne de démarcation par les troupes allemandes. Le document parle de la situation politique et sociale à Lavoux (86), commune située à une quinzaine de kilomètres à l’est de Poitiers. Il y est noté l’inquiétude sur le départ les travailleurs français en Allemagne, l’inactivité de l’ancienne cellule du parti communiste dissout. Il est précisé qu’il n’y a ni mouvement social, ni propagande « antinationale », ni activité terroriste. En plus il est signalé qu’une perquisition de la police allemande a été faite le 02 novembre 1942 quelques jours avant, sans résultats, chez Marie-Rachel PIRONNET, Germaine RAGEAU secrétaire de mairie et ANDREAU un gendarme en non-activité demeurant à Lavoux.

La lecture des recensements entre les deux guerres et juste après la deuxième permet d’identifier plus précisément les personnes sous la surveillance active de la police allemande et des autorités françaises.

Les fiches des personnes impliquées :

Marie Rachel PIRONNET

  • né[e] le 20-01-1906 à Lavoux (86)
  • décédé[e] le 26-09-1988 à Poitiers (86),
  • répertorié[e] aux recensements de Lavoux en 1946-1954-1962 comme instituteur[rice]
  • célibatair[e]e
  • fils[le] de Léon PIRONNET et Ernestine ROUET

Alphonse RAGEAU

  • époux[se] Marie Germaine Jeanne REPAIN
  • né[e] le 19-11-1887 à Celle-l’Evescault (86)
  • répertorié[e] aux recensements de Lavoux en 1926-1931-1936-1646 comme instituteur[rice]
  • marié[e] avec Marie Germaine Jeanne REPAIN (le 19-01-1910 à Marigny-Chémereau (86))
  • fils[le] de Henry RAGEAU et Modeste RODIER
  • héberge son[a] beau[lle]-p[m]ère Antonia Emma LARIBE aux recensements de Lavoux en 1931-1636

Marie Germaine Jeanne REPAIN

  • secrétair[e]e de mairi[e]e
  • époux[se] Alphonse RAGEAU
  • né[e] le 30-12-1891 à Cahors (Lot)
  • répertorié[e] aux recensements à Lavoux en 1926-1931-1936-1646 comme instituteur[rice]
  • marié[e] à Alphonse RAGEAU (le 19-01-1910 à Marigny-Chémereau (86))
  • fils[le] de Auguste REPAIN employé[e] de chemin de fer et Antonia Emma LARIBE né[e] à Carennac (Lot) décédée à Lavoux le 12-01-1945 répertorié[e] aux recensements de Lavoux en 1931-1936

document communiqué par Chantal Popilus, membre de l’APL (Les Amis du Patrimoine Lavousien), le travail d’identification a été réalisé par Robert Granseigne ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Henri ANDRAULT

  • gendarme[e] en non activité en 1942 à Lavoux
  • époux[se] Alice Gabrielle Marie GAUDIN
  • né[e] le 01-02-1893 à Montamisé (86)
  • répertorié[e] au recensement à Lavoux en 1946, absent en 1936-1954, il est retraité
  • marié[e] le 10-01-1921 à Chauvigny(86) à Alice Gabrielle Marie GAUDIN fils[le] de Alphonse Alfred GAUDIN et Marie Gabrielle JACOB
  • fils[le] d’Henri Louis ANDRAULT et Marie Léontine ROY
  • enfant[e]s Jacqueline et Alice-Colette né[e] 1930 bonnetier[ère] qui vit avec ses parents en 1946
  • décédé[e] le 03-07-1988 à Chauvigny

Antonia Emma LARIBE

  • époux[se] Auguste REPAIN, demeurant chez sa fille
  • né[e] le 20-09-1865 à Carennac (Lot)
  • répertorié[e] au recensement à Lavoux en 1931-1936
  • fils[le] de Baptiste LARIBE et de Marie Victorine BAUFFET
  • décédé[e] le 12-01-1945 à Lavoux

Acte de décès d’Antonia LARIBE ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Le pourquoi de cette fiche de renseignement :

Tracé de la ligne de démarcation (décembre 1941) © Gallica BnF ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

On est à deux jours de passage par les troupes allemandes de la ligne de démarcations, ligne qui se trouve entre Jardres et Tercé, deux communes voisines de Lavoux (cliquez sur la carte ci-joint pour visualiser le tracé de la ligne de démarcation). Les services de renseignement allemands et du régime de Vichy font un  état des lieux pour anticiper une éventuelle réaction négative au franchissement de la ligne de la part des Français, en particulier ceux habitant non loin de celle-ci. Lavoux siège d’une ancienne cellule communiste importante est un des possibles points chauds, en marge de la fiche au crayon il y a une annotation « quelle est la proportion exacte de ces membres », qui précise le niveau d’inquiétude des autorités vichyssoise et d’occupation. Les communistes clandestins constituant des groupes actifs de résistance au régime de Vichy et à l’occupation allemande, les autorités ciblent plus particulièrement leurs anciens membres connus.

Germaine RAGEAU née REPAIN la secrétaire de mairie est aussi institutrice, comme son mari, comme Rachel PIRONNET, et a durant la seconde guerre mondiale fait des faux papiers pour les réfractaires au STO. Le maire de Lavoux était très inquiet des agissements de sa secrétaire de mairie et il lui disait régulièrement « vous allez me faire fusillé ». Il y avait localement un réseau de passage de la ligne de démarcation et nombreux étaient les Lavousiens à être impliqués dans des maquis et des réseaux de résistance de la Vienne.

Tableaux d’ascendance :

Marie Rachel PIRONNET est une Lavousienne d’origine, en dehors de madame RAGEAU les autres sont originaires des alentours de Lavoux-Chauvigny. En rouge orangé les personnes citées dans la fiche de police.

Famille RAGEAU

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ANDRAULT le gendarme

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Marie-Rachel PIRONNET
(Les écritures PERONNET PIRONNET sont indifféremment utilisées)

▲ clic pour agrandir l’image

Source documentaire : fiche de police datée du 09-11-1942, franchissement de la ligne de démarcation par les allemands le 11-09-1942. Perquisition par la police allemande le 02-11-1942 de mademoiselle PIRONNET madame RAGEAU et monsieur ANDREAU

Sources iconographiques : Chantal Popilus, membre de l’APL (Les Amis du Patrimoine Lavousien) , AD86

 

#ChallengeAZ │ M… Les Mannevy de Poitiers

Le couple Guillaume MANNEVY et Anne MANNEVY est installé à Poitiers et ils ont passé un contrat de mariage devant M° PÉRONNET un notaire de Poitiers le 26 août 1663. Lui est avocat, dans certains actes il est dit « sieur de Colombiers », il est fils de Guillaume MANNEVY et de Radegonde GARNIER, elle est fille de François MANNEVY et de Anne PICOT. Ils ont eu au moins huit enfants, deux d’entre eux se sont mariés, une fille qui aura sept enfants, dont le mariage d’un seul est connu sans postérité, et un garçon qui quittera Poitiers pour s’établir à Villiers une paroisse du Haut-Poitou (1). Les MANNEVY de Poitiers, tant du côté de Guillaume que du côté d’Anne, avaient des liens avec des échevins de Niort.

Tour Maubergeon

Radegonde GARNIER, la mère de Guillaume, compte parmi ses aïeux un couple d’anciens pictaves, François BOICEAU x Anthoinette COEURDELYON, mariés vers 1465. Ils habitaient une des maisons aujourd’hui disparues et qui cachaient la tour Maubergeon jusqu’aux travaux de désengagement du monument faits entre 1850 et 1905. Ce couple a eu trois filles :

  • Jehanne BOICEAU mariée à Jehan DEMARNEF dit de Liège puis à Nicolas PELLETIER des imprimeurs-libraires,
  • une autre Jehanne BOICEAU mariée à Jacques BOUCHET un imprimeur-libraire,
  • Perrine BOICEAU mariée à Pierre CHERPENTIER un procureur.

Le couple DEMARNEF x BOICEAU représente les quadrisaïeuls de Radegonde GARNIER.

Ascendance de Guillaume MANEVY ▲ clic pour agrandir l’image

Jehan MANEVY de Villiers-en-Plaine :

château-mairie de Villiers (79)

Le fils du couple Guillaume MANNEVY x Anne MANNEVY établi à Villiers-en-Plaine (79)  s’appelle Jehan, il est baptisé dans la paroisse de Saint-Cybard de Poitiers le 04 septembre 1671. Il se mariera deux fois, la première avec Marguerite PILLOT en 1697 à St-Christophe-sur-Roc (79), la seconde en 1720 avec Louise BIRAULT à Villiers. Il a eu une fille illégitime avec Catherine AYMER, conçue entre son premier mariage et son remariage, fille qui se mariera mais ne laissera pas de postérité. Jehan est cité dans les actes comme « sieur de Villiers ». Du premier mariage sont issus 12 enfants dont seulement un aura une descendance notable qui perdure jusqu’à aujourd’hui. Il s’agit de Joseph né en 1714 et marié avec Jeanne-Madeleine VANDIER fille de Jean VANDIER et de Jeanne-Marie-Madeleine MAYNIER, le mariage a eu lieu à Champdeniers (79) le 28 novembre 1750, une sœur de Joseph s’est mariée avec un frère de Jeanne-Madeleine, Françoise MANNEVY avec François VANDIER. Dans l’acte de mariage les parents de Joseph ne sont pas cités, il est majeur et âgé de 35 ans, mais vu son âge et la rareté des MANNEVY dans et autour de Champdeniers on peut sans risque dire qu’il est celui né le 23 avril 1714 à Ste-Néomaye (79) .

Acte de baptême de Joseph MANNEVY

Si à Poitiers les MANNEVY sont des notables ayant une aisance financière certaine, Joseph le fils de Jehan montre qu’il y a eu une certaine paupérisation de la famille, il est marchand tanneur. Il est quand même un notable aisé au niveau de sa paroisse. Si le travail dans les tanneries est très pénibles pour les ouvriers plus ou moins bien payés, celui qui possède une tannerie et qui fait profession de marchand-tanneur est à l’aise financièrement. Le travail de la peau pour produire des cuirs sous toutes ses formes est lucratif pour le patron d’une tannerie, le cuir est un produit de valeur.

Descendance de Jehan MANEVY ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

 Des familles de tanneurs et autres de Champdeniers :

Tanneries de Champdeniers ▲ clic pour agrandir l’image

Joseph MANEVY aura huit enfants dont cinq se sont mariés, quatre filles et un garçon, ce dernier aura seulement deux filles. Si le patronyme MANNEVY disparaît avec ses deux petites-filles, une partie de la descendance de Joseph se retrouve dans la tannerie de Champdeniers, des PROUST des MAYNIER. Il y a aussi des cordonniers liés au travail du cuir. Les filles épousèrent des boulangers, des poêliers. Ensuite l’ascenseur social se met en route et des orfèvres, des horlogers, des médecins apparurent. Certains parmi les descendants furent maires, élus départementaux, député(s).

Descendance de Joseph MANEVY ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

 De nos jours :

Tous les descendants de ces MANNEVY des Deux-Sèvres sont des personnes aussi remarquables et dignes d’intérêt les unes que les autres à leur niveau. S’il faut en sortir un du lot, citons Yannis SUIRE, époux d’une LEMASSON descendante de Joseph MANNVY à la huitième génération. Il est conservateur du patrimoine de la Vendée, c’est-à-dire du Bas-Poitou. Cela reste une histoire de Poitevins. Il a publié de nombreux articles et livres sur l’histoire les lieux et les monuments de la Vendée.

Lien d’ascendance avec les MANEVY ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

(1) Le Poitou se divise en deux sous régions, le Haut-Poitou constitué en gros des départements actuels de la Vienne et des Deux-Sèvres, le Bas-Poitou correspondant en gros à la Vendée. Villers (Villiers-en-Plaine) est à la limite entre les Deux-Sèvres et la Vendée. 

#ChallengeAZ │ Y… Yteuil, une empreinte révèle une chapelle disparue

Iteuil, Vienne 86

Outre le meilleur moyen d’obtenir de belles salades et de beaux radis, bécher, l’exercice favori des jardiniers, s’avère parfois aussi un très bon moyen de remonter le temps et de tutoyer l’histoire locale.

Une mystérieuse chapelle

matrice de sceau, Iteuil, Vienne 86

Matrice de sceau trouvée à Iteuil ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Il y plus de 30 ans un habitant du bourg d’Iteuil a découvert par hasard dans la terre de son potager un objet intrigant pour lui. Après nettoyage, il constata que c’était une matrice de sceau faite en bronze. L’objet est en très bon état de conservation, il a une forme oblongue et présente au dos un petit anneau qui permet de l’utiliser comme pendentif, c’est une matrice de sceau dite en navette. Ses dimensions sont 3 cm en longueur et 1,9 cm en largeur. Sur le devant au centre on distingue un félin dressé sur ses pattes arrières, appelé « lion rampant », avec tout autour un bandeau contenant un texte gravé à l’envers. La gravure de l’animal, vue sa taille, est de très bonne qualité, on reconnait parfaitement un félin, un lion, à l’exception de la tête plus stylisée. Une croix pattée se devine dans le coin haut de l’objet. Un autre sceau étudié a pour dimensions 4 cm sur 2,5 cm, dans les mêmes proportions que le premier, la confection de ces matrices était donc régie par des règles géométriques strictes.

Matrice de sceau, Iteuil, Vienne 86

Matrice inversée

En prenant une photo et en retournant cette vue on peut obtenir une image positive avec le texte écrit à l’endroit. On y déchiffre l’inscription suivante S’H’CAPELL’DEV ISTOLIO :
S pour Sigillum (sceau),
H c’est la première lettre d’un prénom (Hilaire Henri Haubert Hubert…),
CAPELL pour Capellanus (chapelain) ou Capella (chapelle),
DEV pour Deu (Dieu),
enfin Istolio est une forme ancienne et latine de l’écriture d’Iteuil connue par un texte de 1149.

La forme des lettres permet de dater l’objet. Laurent HABLOT du CESCM(1) qui a déchiffré l’inscription propose une date entre 1250 et 1300. C’est donc la signature (sceau) d’un certain H. chapelain de la chapelle de Dieu à Iteuil qui a vécu à la fin du 13ème siècle. Hélas ni le texte ni la figure gravée ne permettent d’en savoir plus sur ce personnage. Comment s’appelait-il précisément ? D’où venait-il ? Le « lion rampant » n’apporte aucune indication.

Il resterait à identifier précisément l’édifice religieux.

A Iteuil le prieuré de Mougon est connu ; la chapelle des Bourdille apparaît dans des textes ; aux villages d’Aigne de la Troussaie et de Bernay il y avait des prieurés et/ou des chapelles. Mais rien ne permet de rattacher le sceau à l’un ou l’autre de ces hameaux. Sur le cadastre napoléonien on ne trouve à Iteuil aucun lieu, aucun champ, faisant référence à une chapelle disparue. Là encore on ne peut pas avoir de réponse, de localisation. La recherche reste ouverte.

Louis Redet dans son dictionnaire toponymique de la Vienne fournit plusieurs autres écritures d’Iteuil, Estolio en 954, Istaol en 1108-1115, Ytolium en 1283, Ytuel 1324, Ytuilg en 1335, Ytuil en 1372, Yteuyl en 1398, Yteuil-Iteuil en 1400, Itueilh en 1426, Iteuilh en 1454, Isteuil en 1479, Ysteuil en 1596.

Dans son Pouillé Beauchet-Filleau cite les chapelles et prieuré de St-Etienne fondé par le sieur Bourdeil, de Mougon-Meugon et de la Troussaie. Jacques MELIN dans son excellent et érudit livre « pages d’Iteuil » parle des différentes chapelles et autres prieurés de cette commune. Il cite en particulier la chapelle en ruine du manoir de Bernay (pages 48 à 51), dont il ne reste que quelques morceaux, chapelle que l’historien LONGUEMAR cite comme ayant le vocable « Précurseur de Notre Seigneur » c’est un bon candidat pour être la chapelle-Dieu du sceau. Il parle aussi de l’ancien château d’Iteuil, de la seigneurie du même nom créé entre 1000 et 1100 selon ses dires (pages 63-64), décrit comme un tas de pierres dans un procès-verbal de visite daté du 06 mai 1653. Y-avait-il une chapelle dans ce château ? Était-elle notre chapelle-Dieu ?

Château de Bernay, Pages d'Iteuil, Jacques Melin, Vienne 86

Le manoir de Bernay, extrait de « Pages d’Iteuil » par Jacques MELIN ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Manoir de Bernay, Pages d'Iteuil, Jacques Melin, Vienne 86

Chapelle en ruine du manoir de Bernay , extrait de « Pages d’Iteuil » par Jacques MELIN

Sur le cadastre Napoléon de 1825 (sources AD86), on voit apparaître un rond avec l’appellation « le Feuvé » correspondant à l’emplacement circulaire d’un château refuge du haut moyen-âge, à l’origine une simple enceinte en rondin de bois sur une motte entourée d’un fossé et s’appuyant sur le dénivelé du terrain d’un côté, qui fut ensuite fortifiée de murs en pierres. C’est le château d’Iteuil de la seigneurie du même nom. Sur une vue aérienne actuelle du bourg d’Iteuil, la construction de lotissements, l’installation d’une école, font que le cercle a en grande partie disparu, on ne distingue plus grand-chose si ce n’est l’arc de cercle correspondant au « passage Feuvet ».

Château d'Iteuil, cadastre, AD86, Vienne 86

Château d’Iteuil, cadastre Napoléon © Archives départementales de la Vienne ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Avec toutes les précautions d’usage, en attendant confirmation ou non, la Chapelle de Dieu doit être très probablement soit celle de Bernay, monument que les éléments architecturaux permettent de dater du 14e siècle ou avant selon Jacques MELIN, soit celle du château d’Iteuil. Le lieu de la découverte dans un jardin d’une maison chemin des Jonchères ne permet guère de privilégier l’une ou l’autre des possibilités.

Je remercie chaleureusement monsieur J.C.P. qui a eu la gentillesse de me montrer et de me faire découvrir cette très belle matrice de sceau

(1) Centre d’études supérieures de civilisation médiévale


Sources : « Pages d’Iteuil » de Jacques MELIN, broché 207 pages, publication 1996

Pages d'Iteuil, Jacques Melin, Vienne 86

Ci-dessous cartographie des lieux cités au cours de ce Challenge AZ.
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#ChallengeAZ │ J… La Jusie, une famille de noiseux « les BOURREAU »

La Jusie, Latillé, Vienne 86, cadastre napoléonien

Localisation de La Jusie, lieu-dit de Latillé, cadastre Napoléon © Archives départementales de la Vienne ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Les BOURREAU de la Jusie bastonnent à la Saint-Philibert

Le 05 août 1726 une information est ouverte contre BERTINEAU, BRIN, Louis, Pierre et Jean BOURREAU et leur sœur, AUBOURG femme BOURREAU, HERBOIREAU, accusés d’avoir maltraité la veille Mathurin fils de Jacques AUBIN aubergiste de Latillé.

Ledit Mathurin AUBIN malade git au lit et ne peut plus vaquer à ses affaires. Il se retrouve avec des chevaux sur les bras qu’il avait ramenés de la foire de Fontenay-le-Comte pour les revendre dans l’année. Pour cela et pour payer Bonaventure RENAULT le chirurgien qui l’a examiné, il demande réparation.

Ce dernier l’a trouvé fiévreux, une plaie sur le front de la largeur et de la profondeur de la moitié d’un pouce, une autre sur le haut de la tempe large et profonde d’un demi-doigt, une autre sur le coronal supérieur de la largeur d’une grosse fève, de nombreuses contusions sur tout le corps, du côté droit, du côté gauche, sur les vraies et fausses côtes, faites par des coups de pied et de bâton. Pour le chirurgien la guérison demandera plus d’un mois.

Joseph JARDEL, sénéchal de la châtellenie de Montreuil-Bonnin et Latillé, et François RANGER, son greffier, procèdent aux auditions :

  • Pierre LAVAULT de Latillé, 18 ans, rapporte que la veille jour de l’assemblée de la St-Philibert à Latillé, vers les 4-5 heures du soir, il jouait aux boules(1) avec Mathurin et Jean AUBIN frères, que les nommés HERBOIREAU et CHAUVEAU se battaient et que Pierre BOURREAU a voulu secourir HERBOIREAU. Mathurin AUBIN s’est alors interposé pour les faire cesser, quand les deux autres frères BOURREAU et leur sœur vinrent par derrière et le frappèrent de coups de bâton sur la tête et le corps.
  • Jean MARTINEAU (15 ans, fils du boulanger de Latillé) autre témoin assigné dit que HERBOIREAU et BRIN se jetèrent sur Mathurin AUBIN, lui donnant des coups de bâton, le faisant tomber à terre, que ledit BRIN lui asséna des coups d’une grosse trique par derrière.
  • François CHAILLOT (42 ans tisserand de Benassay), précise que Pierre BOURREAU de la Juzie, BERTINEAU (valet de DINET de la Bourdillière) et HERBOIREAU (fils du meunier de la Loge) étaient tous sur ledit AUBIN près du lieu où la MARTINELLE avait mis ses bouteilles et qu’ils lui donnaient des coups sur la tête.
  • Jacques (13 ans fils de Charles FOURE laboureur) de la Rouaudière de Latillé, témoigne aussi.
  • Estienne SOROIS (25 ans, laboureur de la Follye Marot de Latillé) précise que Mathurin AUBIN s’est retrouvé dans un fossé où il reçut les coups.
  • Jacquette PENIGAULT (45 ans, femme de MARTINEAU le boulanger qui vendait du pain au moment des faits), Marie (18 ans fille de Charles LUSSAULT servante du sieur LACHAPELLE), Jacques (13 ans fils de Louis TERRASSON tailleur d’habit), André GARNIER (45 ans marchand), ses enfants Marie (12 ans) et René (13 ans) et Marie LEVESQUE (38 ans femme de Pierre BRAULT marchand de la Croix Carrée), tous de Latillé, font des déclarations similaires.

Le grand nombre des assaillants et celui des témoins permet de penser que cette altercation a suscité un grand émoi dans la populace, que l’effervescence était grande dans la paroisse et alentours. Accessoirement on peut se demander si les bouteilles et le vin de la MARTINELLE ont joué un rôle essentiel dans l’affaire.

Identification des protagonistes

AUBOURG épouse BOUREAU l’une des vindicatives animatrices de ce fait divers permet d’identifier avec certitude la fratrie des BOURREAU dont ledit Pierre de la Juzye (Jusie) de Latillé : il s’agit de Renée AUBOURG épouse de Jean BOURREAU.

Louis et Pierre BOURREAU nés en 1704 et 1711 se marieront avec Françoise PINAUD et Jeanne GIRAULT en 1740 et 1735. Ils sont enfants du couple Louis BOUREAU et Marie BASTYE qui se sont mariés en 1694 à Cramard, un mariage quadruple, le même jour que deux frères et une sœur dudit Louis BOUREAU avec deux sœurs et un frère de ladite Marie BASTY.

Le couple Louis BOUREAU x Marie BASTYE a eu 4 autres enfants :

  • Marie (x Louis CHAILLOT),
  • Jeanne (x Mathurin DINET),
  • Pierre sans postérité,
  • et Renée (x André TAUPIN).

Louis BOURREAU veuf en 1705 s’est remarié deux fois :

  • avec Louise DEMON d’où un enfant René,
  • puis avec Marie-Anne PELAUD.
Famille Boureau, La Jusie, Latillé, généalogie

Arbre généalogique des BOUREAU de cette histoire ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

Les quatre couples BOURREAU x BASTYE ont eu une nombreuse descendance, dont de nombreuses personnalités éminentes sont issues, entre autres Thierry PÉRONNET très humble vermisseau du Poitou et Jean-Marie PIGNON époux de l’excellente auteure polémiste des Deux-Sèvres Maud PIGNON.

Les « Jusie » de la Vienne

Le hameau de la Jusie est un écart de Latillé non loin de l’Auxance à côté du moulin du Pont-Aubert. Au début du 19ème siècle sur le plan du cadastre Napoléon on distingue 4 ou 5 bâtiments. La Jusie était sous l’ancien régime ce que l’on nomme une « métairie et maison noble », sous la mouvance de l’abbaye de Ste-Croix de Poitiers, constituée d’un ensemble de 3 à 4 maisons avec leurs dépendances. Son nom apparaît dans les actes dès le 14ème siècle et même avant.

On trouve aussi la Petite Jusie à Lavausseau et la Grande Jusie à Benassay dépendantes du chapitre de St-Hilaire-le-Grand de Poitiers. Leurs noms s’écrit avec la graphie Giusie sur le plan du cadastre Napoléon en 1830. Ces deux hameaux sont cités à partir de 1476 dans les actes.

Grande Jusie, Petite Jusie, Lavausseau, AD86

La Grande et la Petite Giusie (Lavausseau), cadastre Napoléon © Archives départementales de la Vienne ▲ clic sur l’image pour l’agrandir

(1) Les jeux de boules étaient très populaires sous l’ancien régime, avec de nombreuses variantes locales, les boules étaient en bois et plus grosses que les boules de pétanque actuelles.

Sources :  Archives départementales de la Vienne série 8-B-169 justice seigneuriale de Montreuil-Bonnin et Latillé

Ci-dessous cartographie des lieux cités au cours de ce Challenge AZ.
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